
Dans une interview accordée au magazine Jeune Afrique, Momar Nguer, 59 ans, est entré en 1984 chez Total. Nommé, à la fin de 2016, patron de l’ensemble de la division marketing et services – les réseaux de distribution de carburant et boutiques –, mais aussi membre du comité exécutif du groupe, il livre son opinion sur le gaz découvert sur la frontière maritime entre la Mauritanie et le Sénégal.
Des découvertes majeures de gaz ont été faites au large des côtes du Sénégal et de la Mauritanie par la junior pétrolière Kosmos Energy, associée à BP pour leur exploitation. Total a également pris des licences d’exploration dans ces deux pays. N’y a-t-il pas des attentes démesurées vis-à-vis de ces gisements ?
Bien sûr, il y a de fortes attentes de la population vis-à-vis du gaz. Mais le président Macky Sall connaît parfaitement les enjeux du secteur extractif. Il est géologue de profession, formé à l’Institut français du pétrole, et il a travaillé au sein de la compagnie nationale Petrosen. Il n’est pas dans la surenchère optimiste sur les revenus futurs du pétrole.
D’ailleurs, dans les prévisions budgétaires du Sénégal, le gouvernement sénégalais n’a inscrit aucun revenu prévisionnel tiré du gaz. Et c’est peu ou prou la même chose en Mauritanie avec le président Mohammed Ould Abdelaziz, qui est dans la même logique. Avec les découvertes gazières majeures qui ont été faites, j’en connais beaucoup qui auraient annoncé des mesures imprudentes, telles qu’un revenu minimum de 1 000 dollars dans cinq ans !
Êtes-vous optimiste sur la bonne coopération entre deux pays, la Mauritanie et le Sénégal, qui ont par le passé eu des différends politiques ?
Les discussions entre Dakar et Nouakchott à propos des champs gaziers se sont bien passées si l’on compare avec d’autres litiges pétroliers frontaliers, notamment entre le Cameroun et le Nigeria, au sujet de la presqu’île de Bakassi, ou même entre le Ghana et la Côte d’Ivoire.
Le Sénégal et la Mauritanie ont pris l’habitude de travailler ensemble, notamment au sein de l’Organisation de mise en valeur du fleuve Sénégal (OMVS), qui fonctionne très bien ! Je ne suis pas inquiet, ils ont établi entre eux leurs règles du jeu, et ils s’y tiendront.